Le débarquement est prévu à 6 heures du matin … Il faut libérer les cabines pour 5h15 donc nous (les gars) mettons le réveil pour 4h45 : une demi heure c’est largement suffisant pour se lever et tout boucler. Les femmes dans la seconde cabine font une « erreur de calcul » et se lèvent à 4h15 … La sonnerie du réveil a du piquer ha ha. On se rejoint dans le bar panoramique afin de prendre un petit déj’ : les sourires sont sur les visages mais les faces sont fripées par une courte nuit heureusement on aperçoit la terre promise au loin. Ça donne un coup de fouet !
Pour ceux qui ne le savent pas : accoster à six heures ne veut pas dire débarquer à six heures … En effet Steph, Michel et moi sommes dans la cale la plus basse du bateau (plus en dessous c’est les poissons, c’est dire !). Et cela implique de devoir laisser sortir le pont supérieur pour que la rampe d’accès puisse être relevée. Comme les motards sont entrés les premiers dans cette partie du bateau, il est logique d’être les derniers à sortir. Ban sang qu’il a fait chaud là dedans avant que la rampe se lève et nous apporte une bouffée d’oxygène au milieu de cette atmosphère étouffante et viciée. On s’est aussi pas mal amusé en regardant les automobilistes prendre la rampe en marche arrière pour sortir : un grand moment de solitude pour les chauffeurs avec tous les motards qui regardent en jugeant les prestations !
Une fois descendus du bateau : second petit déj’ pour que ces messieurs dames aient leur dose de café ! Pour rappel, nous sommes le 6 juin, il y a encore le couvre feu et seules les terrasses sont ouvertes. Mais à 6h30 Ajaccio parait bien vide pour ne pas dire déserte. Une fois tout le monde en condition, nous nous extrayons de la ville : Bastelicaccia, Cauro. C’est de la voie rapide ce qui permet de se réveiller gentiment avant d’attaquer la somptueuse D27. Ça sent bon le maquis, j’en prends plein les yeux et le bitume est parfait, la route sinueuse à souhait et vide de circulation. J’écris que « j’en prends plein les yeux » car pour Steph en fait ça ressemble à chez eux. Première pause photo au col de Scalella dont le principal attrait est de pouvoir admirer les fameux cochons sauvages corses !
Je profite de l’arrêt pour regarder l’état de mon carénage eeeeet … BANCO ! Je me crame la peau du crâne sur le pot d’échappement bouillant ! C’est magnifique je vais avoir une pastille de chair à vif sur le sommet de la tête pendant tout le séjour. Entre le casque et le soleil je sens que ça va être un vrai régal !!
Suite à ces mésaventure nous basculerons sur l’autre côté du col suivant la D27 jusqu’à la route territoriale T20 (une ex-nationale quoi), le temps de rejoindre la D4. Cette petite D4 s’avère très changeante : on a un bitume correct au début laissant présager d’un col de folie, et puis d’un coup on se retrouve sur une route de chèvre que même les ardéchois hésiteraient à prendre. Entre Vero et « Bocca di Tartavellu » (si j’ai bien compris « bocca di » ça veut dire col de), la route est affreuse! Entre nids de poule et grosses pierres sur la chaussée, il faut ouvrir l’œil! Heureusement tous les cochons que l’on croise sont parqués. Quand d’un coup, sans prévenir, en passant sur l’autre versant pour la descente tout change ! C’est une débauche de virages dans un écrin d’asphalte tout neuf et parfaitement lisse. UNE ORGIE sinueuse, viroleuse à souhait !! La route n’est pas super large mais suffisamment toute fois pour qu’elle ne soit pas traitresse ! Rien que pour cette section, ça valait la peine de se taper un morceau de route pourrie !
Comme cela doit bien faire deux heures qu’on ne s’est pas arrêté pour boire un coup et histoire de prendre la température du groupe, je propose une pause boisson. C’est à Salice à l’épicerie-restaurant « Colomba » que nous faisons notre halte !
Les plus perspicaces remarqueront que nous tournons au sans alcool ! En même temps il n’est pas encore onze heures. Le patron François dit « Fanfan » est un personnage. Il nous parle de beaucoup de choses, de la production de charcuterie notamment et de la saison touristique qui commence. Selon lui les réservations sont au même niveau qu’un mois de juillet normal … « Mouais … Tu serais pas entrain de nous la faire à l’envers Fanfan ? » Il faut dire que Franck a une façon assez particulière de briser la glace avec les locaux :
– Vous, vous êtes pas un vrai corse !
– Pourquoi ça ?
– Vous souriez
On va dire que c’est quitte ou double comme accroche ! Cela ne nous empêche pas d’écouter les discours qu’il doit roder pour la haute saison et qu’il soit un personnage assez attachant. Fanfan nous donnera une adresse pour manger un peu plus loin sans être sûr que ce soit ouvert car il n’arrive pas à joindre son ami. En tout cas nous sommes dans un cadre vraiment agréable pour se rafraichir et profiter, surtout qu’il n’y a personne d’autre. Nous repartons après la seconde tournée histoire de parcourir littéralement cinq kilomètres pour profiter d’un joli point de vue :
Nous continuons ainsi jusqu’au pont de Belfiore où Fanfan nous avait conseillé une adresse pour se restaurer. Pas de bol c’est fermé et comme nous sommes à côté de Vico nous finissons la route jusqu’au village pour nous poser au même restaurant que lors de mon voyage en 2017. L’occasion pour Steph de voir que sa moto fait preuve d’incontinence ! Bizarrement pour une anglaise il s’agit de liquide de refroidissement et non d’huile. Car comme dit le proverbe Triumphiste :
Tant que ça pisse de l’huile c’est qu’il en reste dans le moteur.
Pour l’instant nous ne nous alarmons pas car il s’agit probablement du trop plein qui s’évacue. Le mécano personnel de Steph semble du même avis. Il est l’heure pour un repas diététique largement mérité !
Vous venez de prendre un kilo rien qu’en regardant cette photo. De rien, ça me fait plaisir de partager (les kilos). Et quoi de mieux pour digérer qu’une petite sieste après tout ça ? Nous irons profiter du calme qui règne dans le parc du couvent Saint François Pères Oblats, pour ce qui va quasiment devenir une tradition durant notre voyage.
Malheureusement au bout d’une vingtaine de minutes nous sentons le vent qui rafraichi à mesure que le ciel se couvre. Et ce n’est généralement pas une bonne nouvelle. Une conversation dans la soirée avec Julien (un pote qui est en Corse en même temps que nous) me confirme qu’on a bien fait de ne pas trainer. Je cite :
Pour le moment, c’est pluie soutenue et route humide. Mais ça c’était au début. […] et là… La mer, les poissons, les bateaux, tout ce qui est possible on l’a pris sur la tête !! De mémoire de bastards (et les vrais Kop, sca et jej), ils ont jamais eu autant de quantité de pluie. Voitures en détresse, ruisseaux et cailloux qui envahissent la route, ont été notre quotidien pendant 30 min.
L’expérience ça … Ahem. Sortis de Vico nous prenons la D70 jusque Sagone le but étant de de longer le plus possible la côte pour rejoindre notre destination du soir : Porto. Le changement de paysage est radical : de l’arrière pays montagneux nous passons directement à la magnifique côte corse.
La D81 qui longe la côte avant de s’en éloigner un peu avant Piana est très belle. Tournante mais très roulante il faut quand même faire attention pour garder son permis vu qu’on sort des routes très sinueuses de l’intérieur de l’Île. C’est d’ailleurs lors d’une ultime pause après Piana que nous pourrons commencer à apprécier les roches rougeoyantes caractéristiques des calanques de Piana. (On voit des fois l’orthographe calanche. Je pense qu’il s’agit du mot corse « Calanche di Piana »). Attention les rétines ça commence à déboiter :
C’est dommage les conditions météo ne permettent pas d’apprécier à la pleine mesure le contraste entre la roche rouge/ocre et le bleu profond de la Méditerranée ou de celui du ciel. Plus que quelques kilomètres et nous atteindrons Porto, lieu où nous devons passer la nuit. Comme d’habitude la pause s’impose ! Car les températures sont suffisamment élevées pour nous faire risquer une déshydratation ! On se pose au port histoire de voir comment on va s’organiser pour la fin de la journée.
Il n’est pas encore tout à fait l’heure d’arriver à l’hôtel. En théorie, j’avais prévu de faire un aller-retour jusqu’au lac de Calaccucia en passant par le magnifique col de Vergio. Soit encore environ 120 kilomètres de bonheur. Sauf que c’est le moment de lancer le gimmick du voyage : le taillage à la serpe des roadbooks. La troupe en a assez pour la journée et on de décide pour un plan simple : hôtel, piscine s’il y a, plage, hôtel, resto, dodo. Du lourd !!
Normalement il n’y a pas de piscine dans l’hôtel Colombo où nous avons notre réservation (deux étoiles) mais comme la saison a du mal à se lancer nous sommes surclassés à l’hôtel Capo d’Orto (trois étoiles) qui lui bénéficie d’une piscine avec une jolie vue sur le « golfe de Porto ». Les chambres sont grandes, propres, agréables avec un balcon donnant sur le golfe… Bref un régale après la traversée dans une cabine sans hublot qui ressemblait plus à une cabine de sous-marin qu’autre chose. Petite trempette dans la piscine à 27 °C ! Nat en profite pour faire le show en essayant de s’asseoir sur une sorte de siège à bascule … sans succès. Même les gens présents qui ne nous connaissaient pas n’ont pu se retenir de pouffer.
Il est ensuite temps de profiter d’une plus grande piscine : un truc qu’on appelle la Méditerranée ! Histoire de ne pas s’embêter, nous nous équipons dans un style … « Sécurité Rentière Routière approved ».
Je vous rassure il s’agit de claquettes renforcées et nous avions nos casques et nos gants sur les motos. La plage de Porto paraissait un peu déserte si on considère sa taille et le peu de gens présents.
Le cadre est magnifique, et si l’eau peut paraître fraîche au premier abord, « elle est bonne une fois qu’on y est« . Michel notera toute fois que les petits galets font extrêmement mal aux pieds, c’est désagréable tout de même! Nous effectuons un aller retour de plus à l’hôtel pour nous rincer et trouver un resto dans le port, les pieds dans l’eau !
Après un moment bricolage pour installer l’intercom de ma sœur, il est temps d’aller dormir … la nuit s’annonce chaude voir torride !